Séminaire de recherche interdisciplinaire à l’UA sur la perception, les représentations et les imaginaires aquatiques des mers et des océans, 28 février 2025.

Titres et résumés des interventions
- Frantz Mynard, Maître de Conférences, Centre de droit maritime et océanique (U. Nantes)
- Odile Delfour, Maîtresse de Conférences, Centre de droit maritime et océanique (U. Nantes).
« Les forces imaginantes du droit » face à la puissance des éléments océaniques
Dans son ouvrage, Les forces imaginantes du droit, Mireille Delmas-Marty montre que le droit peut contribuer à nourrir l’idée de bien commun en posant les contours d’une communauté de valeurs par-delà la diversité des cultures et l’opposition des intérêts. Or, dans l’espace océanique, cette diversité des cultures, des intérêts et des usages est au fondement même de l’affirmation d’un droit de la mer, lui-même confronté à la puissance des éléments océaniques dans des proportions inédites.
Poséidon était le seul dieu grec associé à la force brute (mer et séismes, “ébranleur de terre” en grec). En effet, les océans sont des espaces vivants et dynamiques, animés par des forces naturelles d’une puissance incommensurable. Ces forces sont d’abord celles des courants, des marées et des vents qui rythment la vie des écosystèmes marins. Ces forces des océans offrent un potentiel énergétique inestimable. En même temps, la force des vagues, les tempêtes et les ouragans révèlent toute la puissance potentiellement destructrice des océans, menaçant à la fois le littoral et les activités humaines.
Le droit de l’environnement marin se dresse comme un outil clé pour encadrer les activités et protéger les océans. À travers des cadres juridiques comme la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM), les États coopèrent pour limiter la pollution, protéger la biodiversité et réguler l’exploitation des ressources marines. Cette force normative incarne une volonté collective de concilier exploitation et préservation, en veillant à ce que les océans continuent d’être une source de vie et d’énergie pour les générations futures. Ainsi, les forces des océans, qu’elles soient naturelles ou juridiques, sont au cœur des défis environnementaux et énergétiques d’aujourd’hui et de demain tel qu’on peut le voir dans les stratégies à l’œuvre pour décarboner l’énergie et le transport. Elles nous renvoient à son étymologie, tiré du latin vis, la force, le pouvoir d’agir, opposée à la faiblesse, l’asthénie économique et l’éco-paralysie.
- Bertrand Guest, Maître de Conférences en Lettres, 3 L.AM (U. Angers)
La mer en rouge et noir, quand l’écocritique bleue rencontre les questions sociales.
Afin de contribuer à une discussion des perspectives socio-critiques au sein de l’éco-critique, et sur leur nécessaire intersectionnalité, cette conférence propose d’examiner les potentialités de soulèvement que prennent plusieurs motifs aquatiques, de l’eau douce des rivières en crue à la mer, ou plus exactement à rebours. L’idée sera de baliser à travers quelques exemples littéraires, abordés selon une méthodologie comparatiste, la permanence des enjeux de classe dans les questions écocritiques bleues.
- Kerry-Jane Wallart, Professeure des Universités, REMELICE (U. Orléans)
Explorations marines et dévastations océaniques, dans le contexte de la Caraïbe : de La Tempête shakespearienne à la dialectique des marées (“tidalectics”) de E.K.Brathwaite
Laboratoire des circulations océaniques mondialisées depuis la “découverte” colombienne qui ne fut pas celle d’un continent mais de ses îles, la Caraïbe a, en 5 siècles, vu ses ports devenir les sites privilégiés des routes commerciales coloniales et notamment du commerce triangulaire. Les Européens y accostaient par dessein ou par accident, et comme dans la pièce shakespearienne, y trouvaient l’eau douce et le bois pour survivre le temps de ré-appareiller. Un arc conduit ces usages extractionistes de la Caraïbe jusqu’à un tourisme de masse qui continue de peser lourdement sur des ressources limitées, et qui pollue l’ensemble des mers et océan cernant l’archipel. Dans Small Place, Jamaica Kincaid rappelle combien l’île d’Antigua voit les eaux sales des grands hôtels se déverser dans le même Atlantique qui tient lieu de sépulture à des millions d’Africains réduits en esclavage et déportés de force vers les Amériques, morts lors du Passage du Milieu. Cette communication analyse différentes relectures de La Tempête et retrace une lignée de représentations résistantes (notamment Une Tempête d’Aimé Césaire, “Caliban” de EK Brathwaite). Ce sont des écritures caribéennes qui repensent la mer comme matrice de création et qui seront ici mises également au regard de certaines adaptations de la pièce The Tempest donnant à voir de semblables interrogations (adaptation filmique de Julie Taymor, 2010, mise en scène de Robert Carsen, 2017).
- Pascale Peyraga, Professeure des Universités, ALTER (U. Pau)
Vers une écopoétique marine dans les arts hispaniques contemporains
A partir de quelques réalisations d’artistes hispaniques visuels et multimédias (Carmela García, Irati Inoriza, Tania Gandiani, Dhara Rivera, Pavel Aquilar…), nous nous interrogerons sur le développement d’une épistémologie propre aux écopoétiques (marines) dans les arts visuels, qui reposerait sur l’adoption de nouveaux procédés ou la systématisation et la conjonction d’objets d’étude, de points de vue, de sensorialités et de procédés artistiques et esthétiques déjà présents dans les arts.
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Bénédicte Meillon (5 février 2025). Séminaire de recherche interdisciplinaire à l’UA sur la perception, les représentations et les imaginaires aquatiques des mers et des océans, 28 février 2025. Écopoétique. Consulté le 24 mars 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/1398h